par Yann-Yves Biffe le 19 juillet 2012
Forcément, vous les avez bien méritées, vos vacances. Ce temps pour souffler s’avère d’autant plus nécessaire que les Français se sentent de plus en plus débordés par leur travail, ce qui
génère un stress latent et contre-productif. Les outils numériques nomades sont vécus comme de gros contributeurs à ce malaise. Pourtant, un regard inversé par rapport à cet environnement
instable ne permettrait-il pas de gagner un peu de sérénité… avant la rentrée ?
Encore une fois, cette chronique vous donne de la matière directement employable et ici, pour une cause éminemment louable et férocement prioritaire : la justification de vos vacances.
Jusqu’alors, vous alliez faire signer votre feuille de congés à la dérobée, entre deux documents, histoire d’éviter ce regard de votre N+1 qui dit « encore des vacances »,
« aussi longues que ça »…
Cette année, vous irez fier, porté par tout un peuple de travailleurs qui dit : « on a besoin de souffler ! ».
Ça donne à observer une montée du stress
Une étude, reprise dans la newsletter du 25 mai de CadresOnline, a montré que 89 % des Français interrogés disent travailler dans
l’urgence. Forcément, ce sentiment largement partagé demande de l’énergie, d’où la nécessité, pour le bien de l’entreprise, que vous preniez des congés dignes de ce nom pour revenir les batteries
pleines.
Si le stress ponctuel peut être mobilisateur (une petite montée d’adrénaline partagée dans l’équipe booste la créativité et l’esprit de groupe, parlez-en aux chargés d’événementiel notamment),
s’il devient permanent, si l’agent pense qu’il ne maîtrise plus la situation, qu’il est balloté par les événements et son environnement et qu’il s’enferre dans cette situation, alors les
problèmes sont à l’horizon. Et ce pour lui-même, plus sujet à l’énervement et aux erreurs, mais aussi pour l’équipe, car si tout le monde est stressé, la tension globale n’est plus régulée, les
conflits apparaissent à mesure que la patience disparaît. Les grandes organisations en prennent conscience et créent des groupes de travail de prévention des risques psycho-sociaux.
Leur objectif est notamment d’identifier les sources de stress. Les publics en sont une. Dans un contexte social plus tendu, dégradé par endroits, le contact avec des administrés désemparés
demande pas mal de sang-froid.
Pour autant, s’ils sont en seconde ligne par rapport au public, l’encadrement ou les services supports ne sont pas en reste. Selon l’étude citée plus haut, l’organisation même du travail est
anxiogène. « Les Français travaillent beaucoup à court-terme et 95 % d’entre eux estiment que ces urgences professionnelles affectent directement leur vie personnelle. Parmi les
conséquences de ce sentiment d’urgence, il y a le fait que les salariés ont de moins en moins l’impression de maîtriser l’agenda de leur journée de travail. 78 % d’entre eux tiennent une liste de
tâches à accomplir mais sans beaucoup d’efficacité puisque 81 % des Français disent par ailleurs ne pas maîtriser leur organisation. Plus d’une personne sur deux affirme dépasser allégrement les
35 heures de travail hebdomadaires pour traiter les tâches devenues urgentes. »
A la question de savoir ce qui leur fait perdre le plus de temps au travail, 75 % des Français évoquent les réunions. « Elles mettent en retard les collaborateurs dans la réalisation de
leurs missions et accentuent du même coup l’urgence générale. 71 % des personnes interrogées pointent également les collègues et 68 % les problèmes techniques dans le palmarès des éléments «
voleurs de temps » dans le monde du travail. »
Ça donne à creuser le problème ou à y trouver des solutions
Sur cette problématique, le numérique est-il une solution ou un problème de plus ?
« Réseaux sociaux et smartphones ont notamment été pensés pour améliorer le confort de travail des salariés. » Cependant, selon cette étude, ils sont surtout considérés comme
des obstacles à la concentration. « 84 % des personnes interrogées estiment que ces nouveaux outils de communication perturbent leur concentration et 89 % qu’ils renforcent leur
sentiment d’urgence au travail. En cause, les nombreuses interruptions qu’ils provoquent. 67 % des sondés affirment ne pas pouvoir rester concentrés au travail pendant plus de 30 minutes sans
interruption. »
Mais finalement, si on renverse la façon de regarder ces chiffres, n’est-ce pas plutôt un créneau assez long que 30 minutes sans perturbation ? D’autant qu’au bout d’une heure, c’est le
cerveau humain lui-même qui demande à s’aérer. C’est une réalité d’aujourd’hui, le monde fonctionne sur le principe du fractionnement, ou plutôt sur la nécessité de gérer plusieurs tâches,
plusieurs sources d’informations en parallèle.
On pourra le regretter et résister. Dans ce cas, le nouvel environnement technique gagnera le bras de fer et sera de fait une véritable source de stress.
Ou on pourra essayer d’apprivoiser ce nouvel environnement. S’appuyer dessus pour ce qu’il apporte. Lui donner la place qu’il mérite. Ne pas donner son numéro de portable au monde entier. Faire
des points ponctuels des mails…
De même pour vos vacances. Vous allez partir avec le smartphone, que ça vous plaise ou non. Vous allez le maudire et répondre et ça va entamer votre sérénité. Ou vous allez le couper et le
rallumer à la fin de l’été. Ou vous consulterez de temps en temps votre messagerie ou votre boîte mails (non sans avoir activé au préalable votre message d’absence). Le travail aura empiété sur
votre temps de relaxation. Mais vous reviendrez au travail sans l’appréhension de retrouver une tonne de problèmes sur le bureau pour vous accueillir. Et c’est autant de stress en moins pour
ré-attaquer…
Chacun sa méthode pour passer de bonnes vacances, pour peu que ce soit celle que vous avez (à peu près) choisie !